Rencontre Fachoda

La vallée du Nil, à cette époque, était comme le rendez-vous de la plupart des dominations coloniales européennes. La Turquie exerçait sur le Khédive une haute suzeraineté reconnue par les traités ; lAllemagne, par ses possessions de lAfrique orientale, lItalie par celles de la Mer-Rouge, lEtat du Congo à Lado, la France dans le Bahr-El-Ghazal, enfin lAbyssinie, puissance africaine qui avait alors le prestige entier de ses victoires récentes, toutes avaient un intérêt dans les affaires nilotiques. En Lewis D. Levering, The Race to Fashoda, Weidenfeld, 1987. La Vénus hottentote PAR NANETTE JACOMIJN SNOEP En 1885, après la bataille de au cours de laquelle le gouverneur général britannique est tué, le Soudan tombe aux mains des troupes musulmanes et les forces anglo-égyptiennes sont chassées de la région. rencontre fachoda Cette manière de voir fut encore précisée, mais dans des termes heureusement plus favorables, par une lettre de sir Edmund Monson, datée du 10 décembre : Les bases proposées navancent pas beaucoup les négociations, étant donné que les questions les plus contestées ne sont pas touchées Quant à la proposition de reconnaissance des droits de la France sur les rives Nord et Est du lac Tchad, si les autres questions sont réglées, le gouvernement de Sa Majesté ne fera pas de difficultés pour cette condition. Mais, ce faisant, il ne peut oublier que la possession de ces territoires peut, dans lavenir, ouvrir une route vers le Nil, et il ne faut pas comprendre que le gouvernement de Sa Majesté puisse admettre quaucune puissance européenne puisse avoir des droits quelconques à occuper une position, quelle quelle soit, dans la vallée du Nil. Henri Brunschwig, Le Partage de lAfrique noire, Flammarion, 1971. La France, à partir du milieu du XIXème siècle et jusquen 1914, devient en effet un pays créancier, prêteur et rentier du monde-des créances qui vont souvent se volatiliser, des prêts cesser dêtre honorés et des rentes disparaître. Entre 1904 et 1914, les banques daffaires orientent hors de France les trois quarts de leurs placements. En 1904, les investissements extérieurs totaux de la France représentent déjà 45 à 50 milliards de francs, sur 105 à 110 au total! rencontre fachoda Anglophobie et politique de Fachoda à Mers el-Kebir, LHarmattan, 2010 De son côté, ce nest quaprès deux années dun très difficile voyage à travers la opposition de, expédition par la terre trop risquée car en proie à des guerres tribales, utilisation de deux bateaux à vapeur le Faidherbe et le Duc dUzès démontés pièce par pièce pour les transporter jusquaux marécages de quil faut traverser, puis affrètement de trois baleinières, en compagnie de douze officiers et sous-officiers blancs, cent cinquante et plusieurs milliers de porteurs razziés, que Jean-Baptiste Marchand atteint Fachoda le sachant quil y avait avec eux le lieutenant Gouly décédé de maladie et de soif pendant lexpédition et le lieutenant Simon malade et rapatrié en France, décédé à son arrivée. Marchand hisse le drapeau tricolore et rebaptise Fachoda Fort Saint-Louis. A la mort de Léon XIII et après la chute de Méline, les relations entre la République française, les catholiques et le Vatican senveniment une fois de plus. Toute tentative dappréciation comparative des ingérences française et américaine en Afrique subsaharienne se heurte à lobstacle préliminaire de lieux communs hérités des périodes dintense rivalité économique et politique entre les deux puissances. Cherchant à sabstraire du syndrome de Fachoda, les deux intervenants ont souhaité mettre laccent sur les réalisations empiriques issues des programmes daide au développement et des interventions stratégiques plutôt que sur les options idéologiques présidant aux choix politiques.Ce souhait corrobore dailleurs lévolution récente des paradigmes dinterprétation usités par les services diplomatiques français et américain. La désidéologisation des pratiques de justification, consubstantielle à ladoption dune perspective de Realpolitik, semble toutefois plus marquée en France quaux États-Unis. En France, le recours moins fréquent aux grandes arguties idéologiques tranche avec le style moralisateur employé par le président François Mitterrand lors du sommet franco-africain de La Baule. Au cours de ce sommet, le président français avait en effet explicitement subordonné lallocation daides au développement unilatérales au respect par les États africains des libertés publiques fondamentales droit dassociation, liberté dopinion et dexpression et de la démocratie procédurale pluripartisme, pratiques électorales compétitives. Au nom de lidéologie du pré carré, héritée de la période coloniale et du souci gaullien du prestige international, la diplomatie française, tout au long des années 80, a poursuivi une politique de chasse gardée dans le sous-continent africain, sappuyant sur les réseaux dinfluence mis en place par Jacques Foccart dans les années 60 et 70. Aujourdhui, même si ces réseaux fonctionnent toujours, les prétextes se font moins ambitieux. Inversement, aux États-Unis, le discours sur la promotion du respect des Droits de lhomme dans le monde a connu un regain doffensivité au cours des années 90, en particulier à cause de lémergence de messages adverses anti-universalistes, comme le Nouvel Asiatisme des dirigeants singaporiens et malaysiens. La conversion au réalisme paraît, toutefois, rendue obligatoire par la complexité croissante des interactions qui définissent la scène internationale. Le poids des organisations financières internationales dans le paramétrage des politiques publiques institutionnelles nationales sest considérablement accru en Afrique subsaharienne dans les années 80, en particulier à la suite de la mise en place de plans dajustement structurels sous légide du Fonds monétaire international FMI. Le rôle commercial et politique des réseaux transnationaux, quils soient de type ethno-religieux confréries mourides, sectes soufies, de type militaire ou de type diasporique, sest en outre renforcé à mesure que sétiolaient la légitimité dorigine et la légitimité dexercice des États africains. Ces phénomènes concourent à décupler les stratégies de contournement de lÉtat et à amoindrir les infrastructures administratives nationales. Dans un tel contexte, les chancelleries se replient sur des analyses au cas par cas ce qui tend à oblitérer toute stratégie de long terme et à disqualifier les analyses visionnaires fortement idéologisées. La conversion obligée au réalisme de court terme, cest-à-dire la renonciation à lidéologie comme instrumentprivilégié de justification en situation de complexité stratégique, constitue ainsi un premier point de convergence par défaut entre politique américaine et politique française en Afrique subsaharienne. Un deuxième point de convergence se situe dans lappréciation commune des zones de fracture actuelles et virtuelles du sous-continent africain. Lambassadeur Wilson, après avoir rappelé que la libéralisation politique et le progrès économique avaient marqué les années 80 et 90 en Afrique noire avec un taux de croissance moyen de lordre de 3-4 et un nombre de démocraties supérieur à 25, a souligné que sopposaient à des zones de stabilité et de prospérité émergentes espoir de paix au Liberia, en Angola, en Afrique centrale des zones dinstabilité chronique, comme la région des Grands Lacs et le Centrafrique. Des pays comme le Burundi, le Rwanda et la République démocratique du Congo sont en proie à de violents processus de désintégration, soit par le fait daffrontements intercommunautaires de type guerre civile, soit par carence de leadership, et représentent à ce titre une menace pour les États francophones du Nord. Les agences internationales organisations non gouvernementales et institutions financières mondialesse trouvent en outre frappées dune illégitimité croissante qui diminue leur capacité opérationnelle. Par nécessité de jouer les cartes dont on dispose, les USAcontribuent enfin volontairement à la déstabilisation du Soudan islamiste par les pays voisins de la Corne, prenant ainsi le risque dentretenir des conflits frontaliers meurtriers. Pour les diplomaties française comme américaine, lun des défis majeurs du développement économique et politique de lAfrique subsaharienne au XXIe siècle réside donc dans léradication des zones dinstabilité centrafricaine et soudanaise. Lambassadeur Wilson hiérarchise les principes directeurs de la politique africaine des USA de la façon suivante: Malheureusement, la crise des derniers mois de 1895 navait pas amélioré les choses entre les deux puissances, tant sen faut. A Madagascar, la prise de possession ayant été déclarée, le plus simple était den finir et de mettre les puissances en présence dun fait accompli. Cette décision avait même lavantage de détourner les esprits des affaires du Nil. Le Cabinet Méline demanda donc, purement et simplement, aux Chambres lannexion de la Grande Ile africaine loi du 9 août 1896. Les puissances, lune après lautre, à commencer par les États-Unis dAmérique, sinclinèrent et transmirent au gouvernement français la juridiction sur leurs sujets. LAngleterre suivit le mouvement ; mais elle nen était pas de meilleure humeur. LONDRES, 21 octobre M. Chaplin, membre du cabinet, président du contrôle des administrations locales, parlant, aujourdhui, à Sleaport; dit que lattitude et le devoir delAngleterre sont tout indiqués dans la ques,tion de Fachoda. Dans limaginaire collectif français, la crise de Fachoda reste comme une profonde humiliation infligée par un Royaume-Uni triomphant, hautain et forcément de mauvaise foi. En somme, limage même de la abondamment reprise par la presse et les caricaturistes de lépoque. Cet épisode reste comme lun des événements fondateurs mais surtout représentatif de la naissante et fragile, au même titre dailleurs que les scandales politiques et financiers qui ont émaillé le dernier quart du en France. Author Baratier, Albert Ernest Augustin, 1864-1917. Published 1900 La négociation franco-anglaise est lépreuve suprême des diplomates et le gage le plus assuré dune paix heureuse dans lunivers : pour les hommes du métier, il est normal, et pour ainsi dire fatal, que Talleyrand ait achevé sa carrière à Londres. Entre Londres et Paris, la conversation doit être constante, si elle est parfois laborieuse. Lopinion publique en France et laffaire de Fachoda-Persée Ces négociations sétaient ouvertes au quai dOrsay, conformément à la déclaration échangée entre les deux puissances, le 15 janvier 1896. Voyez le Livre Jaune relatif à la Convention du 14 juin 1898, p. 8 et suiv. rencontre fachoda révélant des caractères et entrant ainsi dans lhistoire. Il faut se rappeler les efforts, la mort douloureuse de Gordon le Chinois, expirant les yeux inutilement tournés vers la patrie, impuissante à le secourir. Il faut se rappeler le silence morne et humilié avec lequel cette mort fut accueillie en Angleterre et les ironies qui, à travers le monde, vinrent cingler la face blêmissante des Anglais.